Ivermectine: Les éléphants dans la pièce.
Voici ma réaction à la lecture de l’article Ivermectine: victoire par K.O. en Inde ? du blogue Dur à Avaler, daté du 11 octobre 2021. J’ai écrit cette réponse dans les commentaires de l’article et je crois que cette réponse est d’intérêt public.
Félicitation pour la recherche dans la presse indienne, j'ai aussi tenté l'exercice et c'est vraiment pas évident! Par contre, ton article n'aborde pas l'éléphant dans la pièce, c'est à dire le fait que la campagne de 2021, telle que décrite dans le micro-rapport de l'OMS daté du 7 mai 2021 intitulé "UTTAR PRADESH Going the last mile to stop COVID-19" [1], n'était pas simplement une autorisation d'utiliser l'ivermectine comme en 2020, mais bien une campagne active de dépistage et de traitement. Ledit rapport de l'OMS mentionne que:
"Each monitoring team has two members, who visit homes in villages and remote hamlets to test everyone with symptoms of COVID-19 using Rapid Antigen Tests (RAT) kits. Those who test positive are quickly isolated and given a medicine kit with advice on disease management. All the contacts of those who test positive are quarantined and tested using an RT-PCR at home by a rapid response team."
Il est donc évident qu’il y a deux phases dans l’utilisation de l’ivermectine dans l’état d’Uttar Pradesh et en Inde en général, tes graphiques devraient donc montrer une brisure aux endroits où tu as mis des flèches rouges, soit la campagne passive de l’utilisation de l’ivermectine (jusqu’en mai 2021) et la campagne active d’utilisation de l’ivermectine (après mai 2021). Il est évident que ce n’est pas l’ivermectine qui a fait redescendre la courbe des cas étant donné que celle de l’état du Tamil Nadu a sensiblement la même forme malgré qu’ils ne l’ont pas utilisé, mais ce qui est aussi évident est qu’après la décente de la courbe, les états utilisant cette procédure ont des taux de nouveaux cas per capita beaucoup plus bas. En effet, le taux de nouveaux cas per capita de l’état du Tamil Nadu est environ 400 fois plus élevé que celui d’Uttar Pradesh, qui comptent environs 20 nouveaux cas par jour depuis plusieurs mois.
Est-ce que c’est l’ivermectine qui a fait la différence? Est-ce que c’est simplement l’isolation hâtive grâce à la campagne de détection active de la Covid qui a fait la différence? Honnêtement, on s’en fout, ce qu’on sait c’est que ça a fonctionné, qu’un traitement à l’ivermectine coûte environs 55¢ au cost [2], que c’est un médicament très sécuritaire [3] dont les effets secondaires sont généralement bénins et passagers [4], et reste sécuritaire jusqu’à 10 fois la dose approuvée par la FDA [5]. On est dans une crise tellement grave qu’elle justifie d’exclure des gens de la société avec un passeport vaccinal et de les menacer de les mettre à la rue s’ils refusent le vaccin, mais pas assez grave pour répliquer l’approche indienne, qui coûte presque rien et présente presque aucun risque pour la santé du public, sous prétexte qu’on a pas de DB-RCT assez convaincants? Ça fait juste pas de sens, qu’on fasse ce qu’ils ont fait en Inde et on verra ce qui a fonctionné et ce qui était superflu après!
Aussi, tu mentionnes que l’état de Kerala vient brouiller les cartes étant donné qu’ils ont eux aussi utilisé l’ivermectine sans obtenir de résultats satisfaisants. Encore une fois, tu ignores un autre éléphant dans la pièce. L’état de Kerala avait autorisé l’utilisation de l’ivermectine pour les cas modérés et graves [6]. Cette contrainte, que l’on retrouve aussi dans les DB-RCT qui montrent que l’ivermectine n’a pas ou peu d’effets sur la Covid, fait en sorte que le traitement ne sera pas efficace à coup sûr. En effet, ce que les recherches in-vitro [7] et in-silico [8] ont démontrées est que l’ivermectine bloque la réplication du virus SARS-CoV-2, et comme la Covid est une maladie qui se développe par phase, dont la première est la phase de réplication virale [9], l’ivermectine ne peut pas être efficace à tous les stades de la maladie. Selon ces principes, l’ivermectine doit être administrée durant cette phase, qui dure d’environ 5 jours avant l’apparition des symptômes à 10 jours après l’apparition des symptômes (le pic étant à l’apparition des symptômes). S’il y a des symptômes modérés ou sévères, la phase virale est presque terminée ou l’est complètement, on ne peut donc pas s’attendre à avoir de résultats satisfaisants à ces stades avec l’ivermectine. L’ivermectine n’est quand même pas un médicament miracle! Élément à garder en tête quand tu liras des articles d’études cliniques ou des méta-analyses sur l’ivermectine.
Donc pour conclure, voici les constats qui ressortent de cette affaire :
1) On se fout éperdument de ce qui a fonctionné dans l’expérience indienne. Comme tout est sécuritaire et abordable, on fait la même chose et on démêlera après ce qui a fonctionné, pour la postérité. En situation de crise comme celle qu’on vit, il est absolument irresponsable de ne pas le faire sous prétexte qu’il n’y a pas assez de preuves permettant de quantifier l’effet propre à chaque élément de la méthode.
2) Cinq mois après avoir formé les équipes et supervisé le déploiement de la campagne de santé publique ayant eu, et de loin, le plus grand succès au monde, l’OMS n’a produit qu’un pathétique rapport de 3/4 de pages une fois les images retirées, et ce même s’ils avaient promis dans ce rapport de participer à la rédaction et la diffusion du rapport final. L’OMS n’est pas intéressée à faire connaître l’exploit indien.
3) Les autorités sanitaires nationales, que ce soit au Canada, aux États-Unis ou en Europe, ne sont pas plus intéressés par l’exploit indien.
4) Il faut toujours prendre en compte le moment de l’administration de l’ivermectine lors de l’analyse de l’efficacité du médicament, soit le plus rapidement possible lors de l’apparition des symptômes, afin qu’il puisse faire ce qu’il a démontré qu’il faisait in-vitro et in-silico.
En espérant que j’aie pu apporter un nouvel éclairage à tes recherches concernant ce médicament, et surtout te convaincre de faire la promotion de la méthode indienne, peu importe si c’est l’ivermectine, les autres médicaments ou la simple isolation précoce qui lui confère son efficacité.
Des vies en dépendent,
Jonathan Davidson-Chaput
Sources:
[2] https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2021.06.01.21258147v2
[3] https://www.medincell.com/ivermectin/
[4] https://www.drugs.com/sfx/ivermectin-side-effects.html
[5] https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/12362927/
[6] https://health.kerala.gov.in/pdf/treatment_guidelines_apr_2021.pdf
[7] https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0166354220302011
[8] https://www.ncbi.nlm.nih.gov/labs/pmc/articles/PMC7996102/
[9] https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34569339/